Sécurité maritime – Djibouti: Le ministre de l’Equipement et des Transports de la République de Djibouti, Mohamed Abdoulkader Moussa Helem dit ses vérités
Entre deux tasses de thé au pied de l'hôtel du 2 février de Lomé ( République du Togo), Confidentiel Afrique est passé à table avec le ministre djiboutien en charge de l'Equipement et des Transports. Il revient sur la participation de son pays au sommet de l'Union africaine sur la sécurité maritime, sa place, sa vision, ses ambitions et les enjeux géostratégiques de la plateforme côtière djiboutienne dans le Golfe de Guinée. Entretien exclusif
Sécurité maritime – Djibouti: Le ministre de l’Equipement et des Transports de la République de Djibouti, Mohamed Abdoulkader Moussa Helem dit ses vérités
Confidentiel Afrique : Pouvez vous nous dire l’importance de la participation de l’état djiboutien dont le Président SEM Ismael Oumar Guelleh à ce sommet sur la sécurité maritime de Lomé et la position djiboutienne face aux menaces des côtes du Golf de Guinée ?
Mohamed Abdoulkader Moussa Helem, Ministre de l’Equipement et des Transports de Djibouti : Vous savez comme l’a si bien dit notre Président dans son discours de Lomé « la mer est notre bien commun » a-t- il dit et j’estime qu’il nous incombe de la préserver et de la protéger et nous sommes conscients des enjeux stratégiques qu’implique aujourd’hui la sécurité maritime. A nos jours inutile de rappeler que la criminalité maritime est par définition multiforme et variée, elle est de nature transnationale. Nous faisons face à des différentes menaces maritimes. Par conséquent, elles nécessitent une réponse nationale. La sécurité maritime dois je dire est une affaire de tous, d’où notre participation active à ce sommet.
Pour répondre en anticipant certainement à la deuxième partie de votre question.. Comment rester indifférent lorsqu’une partie de l’Afrique est en proie à des menaces de toute forme de crime même si que la piraterie dans le golfe de Guinée ne devrait pas être néanmoins confondue à celle qui a sévit au large de la Somalie et dans le golfe d’Aden. Pour des raisons géopolitiques, nous avions ici dans cette région un État failli. Les résolutions du Conseil de sécurité qui ont autorisé la communauté internationale à agir ont pris acte de cet état défait.
Mon pays a été le premier a subir pendant toute une décennie les conséquences d’une piraterie sauvage qui ont eu des répercussions négatives sur notre économie
avec l’inclusion dans la zone à haut risque la fameuse HRA ou pendant plusieurs années les mothers ships nous contournaient pour éviter les surprimes d’assurances qui ont donné à des diminutions drastiques de trafics qui se sont traduits par conséquent à des pertes énormes à nos ports mais aussi à des augmentations des frets qui ont eu des répercussions sur nos ménages.
Confidentiel Afrique : Votre pays occupe une position stratégique sur la façade maritime avec son célèbre port, quelles sont les innovations majeures prises par les autorités en termes d’équipements en logistiques et canaux de renseignements sur le corridor, zone souvent utilisée par des bateaux pirates pour contenir ces actes de pillages ?
MAMH : Il est certain que Djibouti reste incontournable part sa position géographique.
Situé entre la Mer Rouge et l’Océan indien, le détroit de Bab el-Mandeb est considéré comme le quatrième point de passage maritime avec 25.000 navires petroliers par an il est le plus important passage en matière de transport du pétrole. A l’articulation entre la péninsule arabique et l’Afrique, Bab el-Mandeb doit principalement son poids stratégique au Canal de Suez qui relie la Mer Méditerranée et la Mer Rouge, permettant ainsi l’approvisionnement
énergétique des pays d’Europe. Point névralgique du commerce mondial, le détroit est cependant comme vous le savez situé dans une région instable où les risques de perturbations du trafic maritime sont élevés en raison de la piraterie, du terrorisme ou encore aujourd’hui hélas du conflit au Yémen.
Djibouti joue un rôle majeur dans les opérations de lutte contre la piraterie et je dirai même
que nous avons été le pivot dans cette lutte.
D’une part, les forces étrangères stationnées à Djibouti apporte un soutien logistique essentielle à l’opération européenne Atalante (soutien des bâtiments de guerre et des actions de patrouille maritime, soutien santé) et d’autre part la République de Djibouti à travers ses infrastructures portuaires qui sont difficilement remplaçable participe à la mobilisation régionale pour lutter contre la piraterie, infrastructures accessibles aux forces maritimes étrangères, que par ses propres capacités militaires et diplomatiques. Djibouti s’est récemment doté d’un réseau de sémaphore et d’un centre opération qui se veut être régional par ses équipements de longs portés. Outre la mission Atalante, il y a des pays comme le Japon qui se sont ainsi engagés dans cette bataille dès avril 2009, suite à l’attaque du Tayakamaiii, mettant à la disposition des forces coalisées des destroyers de sa Force maritime d’autodéfense et Tokyo a comme vous savez ouvert à Djibouti en 2011 sa première base militaire à l’étranger. Entre 2009 et 2013 c’est près de
quatre cents navires de guerre étrangers par an qui ont utilisé régulièrement les infrastructures de nos ports quais d’amarrage, oléoducs de ravitaillement, emprises terrestres pour accueillir les marins afin de renforcer la sécurité maritime dans la zone.
Nul port plus que Djibouti n’a été autant sollicité et rendu plus disponible pour le soutien logistique, opérationnel et juridique de la communauté internationale dans la lutte contre la piraterie.
Je n’oublierai pas de citer le Code de Conduite de Djibouti aussi Instrument de coopération ou Djibouti a été la locomotive de toute la région démontrant clairement sa volonté departiciper à l’effort collectif pour lutter non seulement contre la piraterie, mais aussi contre toutes les menaces qui peuvent s’exercer dans le domaine maritime qui nécessitent certes l’engagement de toute la communauté internationale. Il y aussi le Centre Régional de Formation Maritime de Djibouti, notre pays a su anticipé sur l’un des enjeux essentiels pour le développement des capacités régionales dans le domaine maritime. Celui-ci est bien sûr indissociable du Code de Conduite de Djibouti dont il constitue une résolution complémentaire qui a reçu une approbation unanime des 21 pays membres. Il répond avec précision aux besoins prioritaires d’entrainement commun reconnus comme un des 4 piliers du Code.
C A : Parlons des ressources halieutiques et probablement des ressources d’hydrocarbures dont regorgent les côtes maritimes djiboutiennes, Qu’est ce que le gouvernement fait dans ce sens aussi bien pour la protection des côtes que la distribution équitable des richesses ?
Vous savez pour une meilleure préservation de nos ressources halieutiques nous avons opté plutôt pour une pêche artisanale ou nous nous interdisons à la pêche industrielle, ce qui nous semble la meilleure protection pour un développement durable.
Car la République de Djibouti possède grâce à la pénétration de la mer par le Golfe de
TadjouraH et le Ghoubet, une petite ligne côtière de 372 kilomètres.
La Zone économique d’une superficie de 7910 km2 qui correspond à 1/3 de la superficie du pays . Le plateau continental sur lequel sont concentrées les ressources halieutiques, s’étend sur 12 à 15 km avec de fonds de 20 à 50 m et couvre une superficie de 2492 Km2 ( soit 34,6% ) de la ZEE.
Pour ce qui est des ressources hydrocarbures vous savez aucun sol n’est démuni de richesse. Djibouti investit beaucoup maintenant dans la recherche et la prospection . Je vous donne rendez-vous dans quelques années.
Le président Guelleh est un des grands défenseurs aux côtés du président Tchadien, de la Charte sur la sécurité maritime signée samedi 15 octobre 2016 à Lomé, quelles sont les décisions immédiates que votre gouvernement envisagerait de prendre de retour en Djibouti ?
Aujourd’hui, l’insécurité maritime reste généralisée sur toutes nos côtes africaines recrudescences de tout genre de trafic et de crime, de pêche illicite de piraterie. Devons-nous rester inertes non je ne pense pas, il nous faut agir et cette charte reste historique. Elle marque un pas vers l’avant certes mais surtout elle constitue une impulsion politique. Faut-il rappeler que cette charte en plus s’appuie sur la Stratégie africaine intégrée des Mers et Océans l’horizon 2050 adoptée par la conférence de l’Union Africaine en janvier 2014.Conformément aux dispositions de la charte celle-ci sera rentrée en vigueur dans un délai de trente jours nous resterons fidèles à nos engagements.
Entretien réalisé par Ismael Aidara et Youssouf Coulibaly, nos envoyés spéciaux à Lomé
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