Marc Chergui apparaît décidément aujourd’hui comme un mouton noir. Ces hauts cadres de l’entreprise Bourbon comparaissent devant le tribunal de Marseille pour complicité de corruption dans ce procès prévu jusqu’au 27 mars aux côtés de cinq (5) autres ex-cadres qui devront répondre eux de complicité.
Pour comprendre la portée de ce procès il faut, avant tout, se faire une idée de la SA Bourbon, une société française cotée en Bourse qui réalise un chiffre d’affaires d’un milliard d’euros, compte quelque 8 400 salariés disséminés dans 45 pays et dispose de plus de 500 navires qui fournissent d’importants services maritimes pétroliers.
Versement illégal d’importantes sommes d’argent
La justice française reproche à la SA Bourbon et à ses dirigeants le versement illégal d’environ 3 millions d’euros à des agents publics étrangers détaillé comme suit : 150 000 euros à des inspecteurs du fisc au pays de Paul Biya au Cameroun pour éviter un redressement fiscal estimé à 11 millions d’euros ; 400 000 euros à un intermédiaire en Guinée Équatoriale qui devait faire baisser un impôt de 8 millions d’euros à seulement 44 849 euros, des cacahuètes. Des fonctionnaires du Nigeria auraient bénéficié de 2,7 millions de dollars. Ils auraient permis à la SA Bourbon, là aussi, de ne payer que 4,5 millions de dollars au lieu de 227 millions de dollars pour le redressement de deux de ses filiales.
Ce système a été découvert par le plus grand des hasards courant octobre 2012, lorsqu’un certain Marc Chergui, rentrant d’un voyage d’affaires au Nigeria, déclare la perte de sa valise. Les gabelous marseillais ont retrouvé le petit colis mais sont surpris par l’importance de son contenu : une liasse de 250 000 dollars en coupure de 100. Le propriétaire n’est pas n’importe qui. Il est le directeur fiscal de la SA Bourbon. Suffisant pour zoomer sur ces déplacements.
Marc Chergui feinte les douaniers en déclarant ne pas être au courant de cet argent dans sa valise. Lorsque les limiers le cuisinent, il évoque dans un second temps ses soucis financiers à cause de son divorce. Les douaniers fouillent encore et toujours et l’enquête révèle «une volonté assumée » de la SA Bourbon «qui ne paie aucun impôt en France, de se soustraire au paiement des impôts légitimement dus », en soudoyant des agents de recouvrement au Nigeria, en Guinée-Équatoriale et au Cameroun.
Marc Chergui a avoué aux enquêteurs s’être déplacé à Lagos pour trouver un accord afin que son employeur, la SA Boubon paye le moins possible d’impôts suite à un contrôle fiscal. Mieux, il explique un système organisé dans le même objectif en France. Il est licencié. Mais le pot aux roses de la SA Bourbon est découvert. L’affaire est renvoyée devant le tribunal correctionnel de Marseille. Les avocats de la SA Bourbon se défendent en affirmant que le directeur fiscal a agi pour son compte personnel à l’insu de sa direction.
Éclaircie sous peu
Le procès devra éclaircir toute cette vaste et rocambolesque affaire dénommée désormais « l’affaire Bourbon » et rendre son délibéré le 27 mars prochain. «Ce procès, ce sera le pot de terre contre le pot de fer », déclare Dominique Estève, avocate de Marc Cherqui, l’homme qui a perdu une valise contenant 250 000 dollars en billets, déclenchant ainsi une des affaires de corruption les plus retentissantes du monde sombre et hideux des affaires entre la France et les pays africains.
Par Oussouf DIAGOLA
Grand Reporter à Paris
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