
La plainte a d’abord été déposée le 16.07.2016 par plusieurs actionnaires de Pearl Gold AG, avant que la société elle- même ainsi que son administrateur judiciaire s’y associent, pour «présentation inexacte de la situation» de l’entreprise, « indications inexactes dans la clôture annuelle des comptes, et abus de confiance au détriment de Pearl Gold AG. Elle vise particulièrement Mr Michael Reza Pacha, CEO de Pearl Gold AG jusqu’en mars 2018, et plusieurs membres du Conseil de Surveillance de l’entreprise, dont Pierre Roux, Robert Francis Goninon et Konstantin von Klitzing. Parmi les accusés figure également Stéphan Muller, le président du conseil d’administration d’African Gold Partners SA (‘AGP’), une société de droit luxembourgeois créée le 18.06.2014, et inscrite au registre du commerce le 15.07.2014 sous le no B1885575.
La Lettre qui dédit la posture de Reza Pacha
Le feuilleton commence le 14 juin 2016, lorsque Pearl Gold AG informe Wassoul’Or et son principal actionnaire SODINAF SA, au moyen d’une lettre portant la signature de Pacha et remise par voie d’huissier, d’une transaction survenue un an auparavant entre Pearl Gold AG et AGP. Dans le contrat en question, conclu le 27 février 2015, la société Pearl Gold AG cède à AGP un droit, qu’elle détient, à la livraison de 10,000 onces d’or, exerçable contre Wassoul’Or. Le contrat est signé par Reza Pacha, en sa qualité de CEO de Pearl Gold, et Stephan Muller, PCA d’AGP.
Selon des documents exclusifs consultés par Confidentiel Afrique, le prix de cession a de quoi surprendre, puisque Pearl Gold SA n’encaisse que 175 Euros pour chaque once transférée à AGP, soit un discount de 85% par rapport au prix du marché (1’077 euros l’once le 25.02.15).
Mais surtout, le contrat est assorti de pénalités exorbitantes puisqu’il confère à AGP le droit de convertir ces onces au prix du marché DIX MOIS plus tard en action de Wassoul’Or SA en se basant sur le cours de marché de l’action Pearl Gold AG.
Sur les 10’000 onces cédées, African Gold Partners SA n’a acheté et payé que 5’000 onces d’or, pour la somme totale de EUR 875’000.- mais, cela lui donne le droit d’exiger le paiement de la somme de EUR 5’012’050.- soit près de SIX FOIS son investissement en seulement DIX MOIS.
Ce n’est malheureusement pas tout : Pearl Gold AG étant dans l’incapacité de payer cette somme, le contrat signé par Reza Pacha permet à African Gold Partners SA d’exiger la totalité des 25% que détient Pearl Gold AG dans la société Wassoul’Or SA, seul actif de la société, pour la somme de EUR 875’000.- euros, avec une valorisation calculée sur le cours sinistré de Pearl Gold AG !
Contrat truffé d’irrégularités
Une très belle opération donc pour African Gold Partners SA, beaucoup trop belle, à tel point que l’administrateur judiciaire la réfutera immédiatement. En effet, le contrat est en plus truffé d’irrégularités. Cela ne décourage pas pour autant African Gold Partners, qui inscrit sans scrupule la somme de 875’000.- euros, représentant son seul paiement, mais aussi la valeur des 5’000 onces d’or au cours du marché, EUR 1’177.70 au 22.08.2016, soit EUR 5’888’500.- Plus 1% d’intérêts cumulés par mois, soit EUR 518’188.-, et encore 939’061.77 de frais et pénalités !
Le prix d’achat de ces 5’000 onces d’or est versé sur un compte sequestre de la société PG ouvert auprès du cabinet d’avocat Belmont (Allemagne), qui appartient à Lutz Hartman, et que Pearl Gold AG n’a pu obtenir qu’après une interminable procédure judiciaire, Lutz Hartmann refusant de livrer ce dernier à la justice, invoquant le secret des affaires.
Lutz Hartmann est pourtant le précédent CEO de PG mais aussi son Conseil et celui de Michael Reza Pacha, son successeur. Hallucinant !
Là où l’affaire se complique pour Pacha, c’est que l’examen de ce compte montre que les virements qui servent à honorer la transaction de AGP proviennent de deux sociétés offshores : Union crédit Management Ltd ouverts auprès de Emirates National Bank of Dubai (ENBD) à Dubai (IBAN AE240260000514546011104) ainsi qu’auprès de la banque Julius Baer à Monaco (IBAN MC8714508000015153152004C52), et MP Investment Consultancies Ltd, ouvert auprès de Mashreq Bank Dubai (IBAN AE590330000019000001357).
Une Caisse Noire bien à l’abri du regard des actionnaires de Pearl Gold AG
Ce compte est ouvert au nom de Lutz Hartmann agissant en qualité d’avocat pour le Cabinet Belmont (Allemagne), avec comme UBO «déclaré» auprès de la banque, Pearl Gold AG
Mr Hartmann est décidemment un avocat aux pratiques pour le moins «questionnables» !
En effet, si son cabinet opère pour le grand public sous le nom de Belmont Legal, il est enregistré auprès de l’administration allemande sous le nom de Kanzlei Reinmüller & Cie, ce qui est pour le moins inhabituel.
La découverte et l’examen de ce compte par les nouveaux administrateurs de Pearl Gold AG, pose la question de la complicité de cet avocat, ce dernier s’étant refusé à donner le dit compte au juge d’instruction !
Ce refus a généré une perte de temps nuisible à la manifestation de la vérité dans un dossier où la manipulation médiatique est une arme très efficace aux mains de ces personnages (nous y reviendrons).
Ce compte aura donc été obtenu au terme d’une très longue procédure judiciaire (la plainte initiale date du 16 juin 2016) laquelle aura permis aux suspects de masquer la vérité aux actionnaires de Pearl Gold AG pendant près de deux ans (21 mois) puisque ce n’est que le 23 mars 2018, que le Dr Schössler, juge d’instruction au Tribunal de Francfort, ordonne la saisie du compte séquestre de Hartmann auprès de la Volksbank à Francfort.
Un jugement que nous avons pu lire attentivement, très longuement motivé et ne laissant aucun doute sur la culpabilité présumée de Pacha, et contenant entre autres l’observation suivante : «une saisie rendue nécessaire car le Cabinet Belmont refusait de révéler l’origine des fonds», observation qui laisse peu de place au doute quant à l’attitude bienveillante de Hartmann envers Pacha.
Un compte qui comporte les crédits suivants : EUR 179’930.- en date du 3 mars 2015 (en provenance du compte de Union Credit Management Ltd auprès de ENBD Dubai), avec la mention très explicite de «Loan to AGP », un autre de EUR 360’000.- le 10 juin 2015 (en provenance du compte de MP Investment Consultancies Ltd ouvert auprès de la Mashreq Bank à Dubai) avec la mention tout aussi explicite de «Gold Delivery Purchase », un autre de EUR 176’678.- le 5 novembre 2015 (en provenance du compte de Union Credit Management Ltd auprès de ENBD Dubai) avec une nouvelle fois la mention en référence du crédit de «Loan to AGP », et enfin, le crédit de EUR 182’000.- (en provenance du compte de Union Credit Management Ltd auprès de Julius Baer à Monaco) en date du 1er mars 2016 sans aucune référence.
Ce sont ces crédits d’après les investigations de Confidentiel Afrique plusieurs semaines durant, qui ont justifié la demande d’entraide par la justice allemande auprès de Monaco et des Emirats Arabes Unis. Cette dernière soupçonnant Mr Pacha d’en être l’Ayant Droit. Plusieurs emails saisis dans les documents administratifs de Pearl Gold AG le laissent penser également.
Lutz Hartmann, qui est le Conseil de Pearl Gold AG, peut-il ignorer l’existence du contrat entre Pearl Gold AG et African Gold Partners SA (AGP) ? Dans la négative, il est complice de Pacha dans la spoliation des actifs appartenant aux actionnaires de la société dont il est le Conseil, et touchant une rémunération à cet effet. Il est à la fois actionnaire de Pearl Gold AG, ancien CEO de cette société et son Conseil. S’il a connaissance de ce contrat, il est devant le fait accompli que ce contrat est ILLEGAL.
Il est lui-même le bénéficiaire par le débit de ce compte qu’il opère en toute discrétion de au moins le total de EUR 80’654.11 sur la période allant de mars 2015 à mars 2016. Au titre d’honoraires de Conseil, de domiciliation pour le compte de Pearl Gold AG, et de sa présence régulière aux différents Conseils de Surveillance.
Des connexions qui intriguent
D’autres débits méritent d’être soulignés, notamment ceux en faveur de Stefan Muller, qui n’est autre que le directeur de la société African Gold Partners SA, la société qui achète les fameuses onces d’or à prix cassé de Pearl Gold AG. Ce dernier touchera à titre personnel, la somme totale (selon nos informations) de EUR 21’875.- en plusieurs fois sur cette même période d’une année. L’une des factures honorées par le débit de ce compte qui appartient officiellement à Pearl Gold AG, est adressée à Enrroxs(http://www.enrroxs.com/) la société appartenant à Mr Pacha.
On trouve enfin une facture de EUR 5’184.- le 9 mars 2015 pour des billets d’avion en faveur de Pierre Roux et Lutz Hartmann, voyageant au Mali.
Enfin, Confidentiel Afrique tombe sur une dernière facture intéressante. En date du 1er décembre 2015, on constate un débit de EUR 50’078.- en faveur de Baker u. Mc Kenzie Habib Al Habraaj St. À Dubai, avec la référence « Rg. Baker u. Mc Kenzie, Dubai, an Mr Pacha, Pearl Gold AG für shareholder disputes ». Que vient faire un cabinet émirati sur des dossiers purement allemands ? Ne peut-on pas se poser la question de l’existence d’un montage destiné à éviter la TVA allemande ?
Donc, par le débit de ce compte «discret», en tout cas sous le seul contrôle de Mr Hartmann, Pearl Gold AG finance les frais occasionnés par une dispute entre Pacha et d’autres actionnaires ? Selon nos informations, Mr Pacha est pourtant au bénéfice d’un Stock option «virtuel» très avantageux ainsi qu’au bénéfice d’une participation «très importante» à toute somme d’argent récupérée par Pearl Gold AG précisément au motif que c’est Mr Pacha qui avance les frais des procédures.
Ce dossier à rebondissements aux ramifications insoupçonnées et très complexe, nous a donné, sans doute l’envie d’enquêter en profondeur et nous y reviendrons plus amplement en détails dans nos prochaines éditions.
Enquête réalisée par Hippolyte Gourmantier et Ismael AIDARA
DOCUMENTS EXCLUSIFS
Contrat Pearl Gold-AGP- Stock Option-
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