
En marge de la soixante-neuvième session de la Commission de la condition de la femme démarrée depuis le 10 mars 2025 au Siège des Nations Unies à New York, la journaliste Marguerite Rosalie NDIAYE s’est entretenue en exclusivité avec la Commissaire du Développement Humain et des Affaires Sociales de la CEDEAO, l’experte sénégalaise Madame Fatou SOW SARR. Sans gants. Exclusif
Confidentiel Afrique : Madame la Commissaire, cette année marque les 30 ans de la déclaration de Beijing, où en est -on dans l’espace CEDEAO ?
Fatou SOW SARR: Il faut d’abord se féliciter de la présence des ministres en charge de la question du genre dans les pays de la CEDEAO, mais rappeler aussi l’enjeu, Beijing : 30 ans après. Disons aussi que la CEDEAO est née en même temps que la conférence mondiale des femmes de 1975 et à partir de 2003, elle a estimé important de mettre en place une Agence pour donner plus de poids à sa politique sur les questions d’égalité de genre.
// Des pas énormes ont été réalisés si on regarde les indicateurs au niveau de l’éducation et de la santé //
C’est vrai qu’il y’a des choses qui ont été faites, mais il reste encore beaucoup à faire notamment en matière de leadership et de participation politique. Cependant, il y’a certes des avancées solitaires pour certains pays, mais globalement les indicateurs ne sont pas très prégnants. S’agissant des participations dans les parlements et au niveau des gouvernements, il reste du travail à faire. Toutefois, nous pensons aussi que Beijing plus 30, est un moment pour faire le point, un moment aussi de mesurer les ruptures qui existent parce que les contextes ont changé, nous sommes aujourd’hui dans un monde de digitalisation, de l’intelligence artificielle et l’avenir doit se définir autrement. C’est le moment pour que les femmes ne ratent pas aussi le tournant de l’histoire.
// Il faut que nos institutions investissent davantage parce que la digitalisation, les nouvelles technologies devraient servir à réduire le gap davantage entre les hommes et les femmes //
On devrait le concevoir comme une opportunité pour aller de l’avant.
Confidentiel Afrique: En quoi cette rencontre de la CEDEAO est importante ; qu’est ce qui pourrait être déterminant pour l’avenir des femmes?
Fatou SOW SARR: C’est le lieu vraiment par rapport à l’avenir de faire en sorte que les pays membres de la CEDEAO puissent se retrouver chaque année avant les CSW pour pouvoir parler d’une seule voix au niveau du système des Nations Unies et porter la voix de l’Afrique de Ouest, la voix de la CEDEAO. Je crois que c’est une des résolutions phares de cette rencontre. Nous pensons que la CEDEAO joue sa partition en mettant les moyens dont elle dispose pour pouvoir le faire à travers le Centre Genre mais également l’ensemble des départements de la CEDEAO.
C A: Justement vous avez pris la parole en session plénière lors de la table ronde de la société civile, Pouvez-vous nous faire l’économie de votre plaidoyer?
FSS: C’était important de revenir sur le bilan de Beijing et il fallait aussi revenir sur la naissance de la CEDEAO qui coïncide avec celle de la conférence mondiale des femmes, ce qui explique l’engagement très fort de cette organisation sur les questions de l’égalité qui a abouti à la création d’une agence dédiée qui est le Centre pour le Genre et le Développement basé à Dakar. Les avancées sont importantes, parce qu’au niveau de l’éducation, de la santé, les luttes contre les violences , l’excision sur l’emploi, sur le travail des femmes, sur le renforcement des capacités, nous avons voulu mettre l’accent sur les innovations. En ce qui concerne la CEDEAO, nous avons voulu désormais mettre beaucoup l’accent sur la production de connaissance et la gestion de données en ligne pour avoir une base fiable et transversale qui nous permette d’avoir des politiques publiques plus importantes. Et c’est comme ça que nous avons pu obtenir comme résultat ce que nous avons pu présenter: le Gender baromètre de la CEDEAO qui désormais permet de voir pour chaque pays ces gaps et nous aider à un meilleur accompagnement.
//En ce qui concerne la CEDEAO, nous avons voulu désormais mettre beaucoup l’accent sur la production de connaissance et la gestion de données en ligne pour avoir une base fiable et transversale qui nous permette d’avoir des politiques publiques plus importantes//
A partir de ce Gendre baromètre, nous avons aussi créé l’indice de l’égalité de la CEDEAO a l’instar de ce qui se passe avec l’indice Mo Ibrahim qui pose la question de la bonne gouvernance, l’indice de l’égalité qui essaie de voir quel est le classement de nos États en fonction de leur performance et c’est ainsi que pour cette année, c’est la Côte d’Ivoire qui vient en tête suivi du Sénégal et du Ghana. Nous avons beaucoup mis l’accent aussi sur la question de la paix et de la sécurité, parce que c’est la question essentielle pour notre sous-région. Ce qui nous a amené à mener toute une série de dialogue communautaire qui vont nous mener à un dialogue politique avec les Chefs d’États pour qu’on ait ce que j’appelle un visage féminin de la gestion de la paix, parce qu’il n’y’a pas assez de femmes sur les questions de la paix et des conflits. Et c’est cela qui explique aussi la mise en place de l’Académie de mentorat des jeunes pour une meilleure implication sur les questions de paix et de la sécurité dans la sous région. Donc la CEDEAO, peut être satisfaite de tout le travail d’accompagnement qui est fait au niveau des états membres et qui le reconnaissent mais en s’adossant sur des données via une plateforme digitale qui permet à chaque pays de mesurer ses propres politiques publiques.
Propos recueillis par Marguerite Rosalie NDIAYE, depuis New-York pour Confidentiel Afrique
RSS