
Figure respectée du monde des médias, le journaliste et écrivain nigérien, Seidik Abba, spécialiste du Sahel, fait l’objet d’une surveillance suspecte en France où il vit et exerce depuis plusieurs années son métier. Dans une orthodoxie inoxydable et exigence professionnelle.
L’affaire Seidik Abba fait bruit, agace ses proches et ses confrères. Un « deep connecting » qui étale sa puanteur. Ces derniers crient à la « conspiration » et dénoncent une atteinte grave à la liberté de la presse. Avec une possible atteinte dans l’air à son « intégrité physique ». Les autorités françaises, pour leur part, sombrent dans le silence… Pour combien de temps?
Que veulent- elles ? On se serait cru sous un régime autoritaire en Afrique, mais la scène se déroule en France, terre de démocratie, où le journaliste nigérien, Seidik Abba, détenteur d’une carte de presse, est mis sous surveillance sans base légale. Paris, la capitale des droits de l’homme, est bel et bien le théâtre de cette » grosse cabale », dont les autorités françaises se seraient bien passées. Selon un communiqué du Comité de soutien à l’ancien Rédacteur en Chef à Jeune Afrique, publié le 4 juillet dernier dont détient copie Confidentiel Afrique, toutes ses communications (SMS, téléphone, courriels) sont épiées en dehors d’une procédure judiciaire. «Il s’agit là d’une atteinte gravissime à la liberté de la presse et d’une entrave inqualifiable à son activité professionnelle», regrettent les signataires du texte, les journalistes Sadio Kanté Morel et Makaila N’Guebla. Face à cette situation aussi inédite que rocambolesque, le Comité de soutien à Seidik Abba, qui n’entend pas croiser les bras, appelle les autorités françaises compétentes à faire «de toute urgence» la lumière sur cette affaire de nature à jeter le discrédit sur le pays de Marianne.
Les soutiens du journaliste nigérien projettent d’organiser une conférence de presse, le mercredi 9 juillet prochain, à Paris, pour apporter des éléments « factuels » et «précis» de cette surveillance, réaffirmer l’exigence du respect de la liberté de la presse et rappeler les instruments internationaux relatifs à l’exercice du métier de journaliste auxquels, la France a souscrits. Aux yeux des proches et confères de Seidik Abba, il ne fait l’ombre d’aucun doute : sa mise sous surveillance illégale vise à museler une voix libre et indépendante, emblématique du journalisme panafricain. Ils pourraient ne pas avoir tort, dans un contexte où la politique française sur le continent africain est fortement décriée, au point de faire perdre son influence d’antan. Ses positions sont lucides, objectives et bien tranchantes.
Un coup de la « barbouzerie française » qui fait jaser
Ex-journaliste de l’agence panafricaine de presse (Panapress) accrédité auprès du Quai d’Orsay et couvrant l’Élysée et collaborateur régulier de TV5 Monde, de France 24, de la BBC ou encore de La Voix de l’Amérique, Seidik Abba est respecté sur les plateaux français comme dans les rédactions africaines. Ce journaliste au parcours honorifique est une voix emblématique qui compte. Seidik Abba est devenu au gré des épreuves rigoristes du métier de journaliste une institution. Il est connu surtout pour ses analyses rigoureuses et sans complaisance des sujets politiques. Ses interventions tranchent souvent avec la langue de bois ambiante, dont certains chroniqueurs à la solde des groupes de pression et d’influence s’accommodent. Dans cette affaire de surveillance dont il est victime, Seidik Abba évoque une tentative de déstabilisation orchestrée par des services qu’il qualifie ouvertement de «barbouzerie française.» Il estime avoir été visé par un raid avorté, en raison de son franc-parler et de sa couleur de peau. «Ils m’ont pris pour un petit Nègre en se disant que ça ne fera pas de vagues», a-t-il confié à Confidentiel Afrique. Des mots lourds de sens, hilarants qui révèlent le malaise qui entoure ce dossier aussi sombre qu’intriguant. Un journaliste africain qui ose penser différemment des autres. Qui ose critiquer. C’est du Seidik Abba tout craché. Qui ose brandir une carte de presse française comme un droit et non comme une faveur ? Et si derrière les traits de simple chroniqueur se cachait un intellectuel africain affranchi de toute tutelle, qu’il faut faire taire ? Qui veut sceller le sort de ce libre penseur, prêt à mourir pour ses opinions ? La mise sous surveillance hors cadre réglementaire du journaliste nigérien dans la capitale française alimente les spéculations. Pierre angulaire de la démocratie, la liberté de presse ne saurait pourtant être remise en cause, surtout dans un État de droit comme la France. Tant qu’il respecte le cadre légal d’exercice de la profession, un journaliste, fut-il africain exerçant en terre française, peut exprimer ses opinions, y compris critiques envers les institutions ou les puissants lobbies. Au-delà de la personne de Seidik Abba, cette affaire rappelle la nécessité de respecter les principes fondamentaux dans une démocratie établie : la liberté d’informer, le pluralisme des voix et l’égalité devant la loi. A l’heure où certains pays répriment violemment la presse libre, l’Hexagone, classé 21e dans le classement mondial de la liberté de la presse en 2024 par Reporters sans frontières (RSF), peut-il se permettre d’être à son tour pointé du doigt ? La patrie de la liberté doit continuer de mériter son nom… A quand finira ce jeu de poker sur les Bords de la Seine? Seidik Abba tient bon. Ce n’est que du moulin à vent. Un sempiternel coup d’épée dans l’eau.
Par Chérif Ismael AÏDARA (Confidentiel Afrique)
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