Depuis le 25 septembre, l’archipel malgache vit au rythme d’une crise politique fulgurante, née de la mobilisation d’un mouvement de jeunes dénonçant la stagnation socio-économique et l’autoritarisme présumé du président Andry Rajoelina « TGV » (51 ans). Ce mouvement, en quelques jours, a su capter l’attention nationale et internationale, mobilisant dans les grandes villes et imposant à l’exécutif une pression inédite depuis les contestations qui avaient conduit Rajoelina au pouvoir il y a plus d’une décennie. Coup d’état militaire a-t-il été consommé ou en téléchargement ?
La rupture institutionnelle s’est accélérée vendredi dernier, lorsque des officiers de haut rang, identifiés comme appartenant au CAPSAT, le Corps d’administration des personnes et des services de l’armée de terre, basé à Soanierana, près d’Antananarivo, ont annoncé publiquement leur soutien « au peuple » et à ses revendications. Cette bascule militaire contre l’autorité présidentielle constitue un signal grave : à Madagascar, où l’armée reste un arbitre silencieux de la vie politique, une telle prise de position précipite souvent les dénouements.
Rajoelina exfiltré du palais par l’homme d’affaires Rafatomanga
Dans ce contexte, des informations confirmées par plusieurs sources locales à Confidentiel Afrique et relayées par des médias régionaux ont alimenté la thèse d’une fuite imminente du chef de l’État. Trois avions privés attendaient, selon des sources exclusives de Confidentiel Afrique, sur le tarmac de l’aéroport d’Antananarivo, dont un affrété par un richissime homme d’affaires malgache, proche du président Rajoelina, du nom Rafatomanga, connu pour ses opérations d’exfiltration d’urgence. Des liens ont été évoqués avec l’affaire Carlos Ghosn, l’ancien PDG de Renault-Nissan exfiltré du Japon en 2019. Le nom de ce richissime homme d’affaires avait circulé dans les officines diplomatiques et de renseignements. Bien que non authentifiées officiellement, ces révélations ont renforcé le sentiment d’un vide au sommet de l’État.
Depuis plusieurs jours, le président reste invisible : aucun déplacement public, aucun discours télévisé, aucune réunion gouvernementale de crise communiquée. Des rumeurs insistantes le disent hors du palais présidentiel, peut-être déjà sur le départ, voire à l’étranger. En l’absence d’informations transparentes, la rue s’empare du récit, et l’espace médiatique est saturé de spéculations.
Cette situation traduit deux faiblesses structurelles de la politique malgache. D’abord, la fragilité des institutions face à une pression populaire soutenue : contrairement aux démocraties consolidées, Madagascar peine à gérer les protestations dans un cadre républicain stable, et le rôle de l’armée est souvent déterminant dans la sortie de crise. Ensuite, l’absence de communication officielle ouvre la voie à la prolifération de récits concurrents, affaiblissant encore la confiance des citoyens dans le pouvoir et alimentant la polarisation.
À l’heure actuelle, Madagascar semble suspendu entre deux scénarios : un départ de Rajoelina, orchestré discrètement via des appuis financiers et logistiques extérieurs, ou un bras de fer institutionnel où l’armée imposerait une transition. Dans les deux cas, l’issue immédiate ne résoudra pas les tensions profondes liées à la pauvreté, aux inégalités et à la crise de légitimité qui mine le pays depuis des années. Les prochaines heures diront si Antananarivo entre dans une nouvelle séquence de son histoire, marquée une fois de plus par le contraste entre le tumulte des rues et le silence feutré des bureaux du pouvoir. Selon des informations de Confidentiel Afrique, Paris devrait être sa destination finale, sauf changement de dernière minute, où vivent son épouse et ses enfants.
Par Ismael AÏDARA (Confidentiel Afrique)